RAMBLE ON | Siobhàn Enya O'Reily

I – Les Racines

Les Racines. Petit détour incontournable d'une bonne biographie !
Deux îles, deux paysages verdoyant, deux familles, deux noms et environ 13.000km d'écart. L'Irlande et la Nouvelle-Zélande.

Irlande et Declan O'Reily. Declan est issue d'une grande famille. Il n'a pas moins de six frères et sœurs et ils vivent tous à Limerick ou aux alentours. Une famille très soudée, qui vit principalement de l'activité agricole, l'élevage laitier plus exactement. Declan est le plus jeune de sa fratrie et aussi le seul qui a refusé de rentrer dans le « moule » familiale. Il est reporter-photo pour l'Irish Independent.
Nouvelle-Zélande et Hannah Stewart. Elle est native de la Nouvelle-Zélande, d'un père néo-zélandais et d'une mère australienne. À l'inverse des O'Reily, les Stewart ne sont pas une famille très étendue, Hannah a une sœur plus jeune qu'elle. Ils vivent à Auckland où Hannah a travaillé comme serveuse.

Maintenant, la rencontre. Tout démarre en 1985, lors de l'affaire du Rainbow Warrior. L'Irish Independent envoya une équipe de reporter sur place, dont Declan. Ces lors de ces longues semaines d'investigations qu'il rencontra Hannah, une jolie et jeune serveuse qui travaillait dans un restaurant sur le port à quelques dizaines de mètres de là où le bateau explosa.
Très vite, l'intérêt de Declan pour le Rainbow Warrior passa en second plan afin de se concentrer un peu plus sur Hannah. Un an plus tard, le jeune coupla se maria. Declan prit la nationalité néo-zélandaise et ils déménagèrent à Dunedin où il trouva une bonne place dans un journal local. C'était une ville paisible, tout de même assez grande, ils achetèrent une propriété en périphérie de la ville, afin d'y fonder une famille.
Celle-ci ne tarda pas à se fonder, en 1987, lorsque Ryan vint au monde suivi trois ans après de Maïwenn. Puis trois ans après encore, Siobhàn. Ce sera la dernière de la fratrie et franchement, la plus intéressante.


II– Fille de l'Hiver

Fille de l'hiver. Pourtant, loin d'être froide, Sio était une enfant dès plus chaleureuse. Bébé joufflu et jovial, elle ne se départissait jamais de ce sourire si enjôleur. Elle passa les huit premières années de sa vie en Nouvelle-Zélande, à vivre à la campagne, au grand air, à jouer avec ses frères et sœurs, à s'épanouir. Et en effet, la fratrie O'Reily s'épanouissait plutôt bien.
Faut dire que l'éducation de leurs parents les poussaient dans ce sens-là. Hannah et Declan s'inspiraient beaucoup de la pédagogie Montessori pour éduquer leurs enfants, ça, combiner avec leurs boulots et leurs passions respectives – écriture pour lui et le dessin pour elle – il n'était pas rare que les enfants soient souvent livrés à eux-mêmes. Ils apprirent très tôt à se responsabiliser et à se gérer, mais comme les parents évitaient de trop interférer dans leur « développement personnel » pour ne pas « porter atteinte à leur créativité », souvent, ils agissaient de manière individualiste et, soyons francs, carrément égoïste, sans trop se soucier du bien commun.
Bonne ou mauvaise, leurs éducations en fit des enfants très débrouillard et très intéressés sur beaucoup de choses. Ryan, s'épanouit dans le domaine du sport et notamment du rugby, Maïwenn, dans la musique – elle est d'ailleurs violoniste et vie de son art – et enfin, Sio, se passionna pour le dessin, comme sa mère.

C'est à la huitième année de Siobhàn que le couple quitta la Nouvelle-Zélande pour l'Irlande,
Declan voulant se rapprocher des siens et permettre aux enfants de connaître aussi, la famille de l'autre côté du globe. Après tout, il vivait en Nouvelle-Zélande depuis prêt de 15 ans maintenant.
Ce changement de vie, Siobhàn et sa sœur le vécurent bien, moins Ryan qui rentrait dans sa période d'ado rebelle, mais dans l'ensemble, s'acclimater à leur nouvelle vie fut relativement aisée. Quoi que Siobhàn a eu quelques démêlés avec ses cousins les plus rustiques. Après tout, elle avait quelques traits de caractères assez particuliers, par exemple, elle pouvait parler toute seule ou alors elle était, par moment, complètement dans ses pensées, dans la lune comme on dit communément, si vous ajoutez à ça qu'elle ne portait quasiment jamais de chaussure, même pour marcher dans la rue, il était facile de trouver des objets de moqueries, choses dont ne se privait pas ses cousins. Et comme elle était une enfant au caractère bien trempée, il y eu pas mal de clash, mais ça restait assez enfantin. Bien que la confiance de Sio en elle-même, bien affirmé pour son âge, en prit un coup et qu'elle se mettait à se demander si en effet, elle n'était pas un peu bizarre. Pourtant, le plus bizarre chez elle, demeurait encore caché

Le gros changement pour Sio s'opéra trois ans plus tard, lorsqu'elle reçut sa fameuse lettre de Poudlard.


III – Curieuse et Créatif

Curieuse et créative. Forcément, elle ne pouvait finir qu'à Serdaigle. Mais avant ça, avant la répartition, il s'en ait passé des choses. Pour une enfant comme elle, ces révélations, était un choc important et franchement déstabilisant. Sa confiance en elle prit un gros coup, comment allait-elle s'adapter ? Elle qui, jusqu'à présent se moquait de ce que les autres pouvaient penser d'elle, se mit à se poser vachement de question quant à sa faculté a s'adapter à ce nouveau monde, à ce qu'allait penser les autres d'elle, elle ne voulait pas passer pour une gourde et il y avait tellement de choses à apprendre. La magie, ça consistait à quoi exactement ? Et Poudlard ? Et comment ça allait se passer les cours ? Est-ce que c'était vraiment une sorcière ? Est s'ils se trompaient ? Si jamais elle était incapable de faire le moindre truc ? Trop de questions, pas assez de réponses et des réponses qui amenaient à davantage de questions.

L'émerveillement vint quand elle se rendit sur le Chemin de Traverse pour la première fois. Des étoiles qui brillaient dans ses yeux et surtout, la boule d'angoisse – au poids d'une boule de bowling - s'était envolé, temporairement du moins.
Afin de se préparer à ce qui allait suivre, elle avait tenu à s'informer au mieux de ce qu'était Poudlard, elle avait donc acheté ce qu'on lui avait conseillé chez Fleury&Bott « L'Histoire de Poudlard ».
Les premiers mois étaient assez compliqués pour elle. Elle qui était d'un naturel jovial, mais qui avait une capacité d'intéressement assez limité aux autres avait du mal à se trouver de réel amis. Du coup, elle était assez souvent seule mais elle ne se coupait pas des autres pour autant. Elle passait beaucoup de temps à étudier, mais ça aussi, c'était un problème pour elle, car elle avait l'impression de se « forcer », après tout, toute sa maison travaillait dur et elle avait beaucoup de choses à apprendre et une curiosité à étancher, mais bien que les cours soient cool – vachement plus qu'un cours de math – cela restait tout de même des cours et il y avait des matières plus chiantes que d'autres.
Lors de sa deuxième année, ses parents se séparèrent, elle ne l'apprit qu'en rentrant chez elle au mois de juin, ses parents ne voulant pas l'inquiéter avec ça. Ce fut un été particulièrement pénible et c'est avec soulagement qu'elle retourna à Poudlard pour la troisième année.
Ce fut cette année là qu'elle trouva sa place à Poudlard – sûrement à cause de problèmes plus important qui surgissaient dans sa vie que ceux de faire ses devoirs à temps. Bien acclimatée à sa vie de sorcière et à l'école, elle ne se souciait plus de ce qu'on pouvait penser d'elle et miné par la séparation de ses parents, elle avait tendance à envoyer boulet ce qui ne lui plaisait pas, sans s'accommoder d'une quelconque diplomatie. Elle qui s'était un peu « forcé» à rentrer dans le moule, reprit ses vieilles habitudes, parler seul, marcher sans chaussure et même ça, chez les sorciers, ça fait parler. Du coup, elle se retrouvait légèrement en marge des autres, surtout qu'elle étudiait moins aussi et du coup, chez les Serdaigles, ça faisait d'elle une sorte de rebelle. Elle n'était pas mauvaise pour autant, mais sa curiosité lui jouait de mauvais tours. En potion par exemple elle était très douée, mais elle avait une fâcheuse tendance à vouloir improviser, elle s'est empoisonnée deux/ trois fois, fait fondre pas mal de chaudron et a subi de nombreuses brûlures, mais c'est les risques de l'expérimentation et elle prenait ça avec philosophie. Les enseignants avaient du mal avec elle, ne sachant jamais sur quel pied danser. Finalement les années passèrent et la Serdaigle trouva des amis chez les Serpentard ou les Poufsouffle - les Gryffondor étaient trop bruyants à son goût – et eu son premier copain à l'âge de 15 ans, un garçon de Serpentard avec qui elle resterait plusieurs mois avant qu'elle le largue parce qu'elle se rendait compte qu'elle ne l'appréciait pas vraiment, mais encore une fois, c'est sa curiosité, l'envie de se découvrir qui l'avait poussé à explorer cette facette d'elle-même.
Elle passa ses BUSES avec succès, bien qu'elle se planta dans quelques matières, mais rien qui ne puisse l'empêcher de continuer dans la voie qu'elle visait : devenir médicomage, bien sûr, ce qui l'intéressait le plus là-dedans, c'était de faire des recherches, l'expérimental.
Les deux années jusqu'à ses ASPIC s'écoulèrent tranquillement, bien qu'elle commençait à en avoir un peu marre du château, elle avait hâte de partir. Comme à son habitude, elle n'avait guère d'ami, quelques relations amoureuses mais c'était toujours très court, juste le temps de se sentir importante pour quelqu'un, combler un manque affectif et puis après elle se rendait compte qu'elle n'avait pas besoin de quelqu'un. Cela lui apporta préjudice et on lui colla une étiquette de « fille facile ». Dire qu'elle s'en foutait serait mentir, mais elle essayait de ne pas y accorder trop d'importance, bien que Sio aurait volontiers crucifier quelques personne.
Elle réussit ses ASPIC avec un succès mitigés, mais encore une fois rien qui ne l'empêchait de suivre la voie souhaitée.

La voie souhaitée se retrouva être une impasse. En fait, elle en a eu vite marre, car après sept ans d'études, elle devait continuer les études, alors oui, elle était à Ste-Mangouste et elle jonglait entre pratique et théorie, mais c'était encore complètement figé et elle s'attira les foudres de son entourage professionnel, car elle était rebelle, tête-en-l'air, je-m'en-foutiste et surtout impertinente.
Du coup, elle quitta Ste-Mangouste, fit ses bagages et parti faire son tour du monde. Passage traditionnel de bien des sorciers. Elle voulait partir un an et reprendre sa formation, ça lui ferait du bien de changer d'air. Sauf que ça dura plus qu'un an.


IV – Dessine le monde Sio

Dessine le monde Sio ! C'est avec cette idée particulièrement abstraite, que Sio prépara son voyage. Bien sûr, sa famille n'était pas très emballée à cette idée, mais cela faisait quelques années déjà qu'ils voyaient Sio s'éloignait d'eux, un fossé se créer, elle menait sa barque et c'était une bonne chose, sauf qu'un monde les séparaient. Sa mère vivait à Cork maintenant, elle n'était pas rentrée en Nouvelle-Zélande, sa vie était là où été ses enfants. Son père, vivait toujours proche de Limerick, sa sœur était à la Royal Academy of Music à Londres et son frère désormais marié était un jeune entrepreneur dans le bâtiment qui avait une fille. Ils avaient tous une situation, une famille, un avenir professionnel. Elle était en marge de ça, mais elle était jeune, elle avait du temps pour penser à son avenir. Puis, honnêtement, ça l'angoissait de rentrer dans une « routine ».
Un matin, elle se leva et décida que c'était le bon jour pour partir.

Elle commença par l'Europe, surtout l'Europe de l'Est, elle voulait vraiment se dépayser et rester dans les pays d'Europe de l'ouest ne l'intéressait guère. Elle finit son voyage en Europe par un tour du bassin méditerranéen avant de se poser un moment en Afrique du Nord. Elle resta plusieurs semaines à vivre avec une caravane de Touareg et ça reste un de ces moments les plus forts de son voyage. Elle descendit ensuite jusqu'en Afrique du sud en passant par la côte-ouest africaine, puis elle remonta la côte-est jusqu'au moyen-orient. Elle passa au nord de la mer Caspienne, traversa le Kazakhstan, la Mongolie pour monter jusqu'en Sibérie, avant de redescendre par les deux Corées, la Chine et toute la région du sud-est asiatique. Elle se posa presque six mois dans les différentes archipels. Arriver à ce stade de son voyage, elle était partie depuis près de trois ans.
La suite, c'était l'Océanie, elle alla en Australie, puis en Nouvelle-Zélande voir sa tante et ses grands-parents, elle resta quelques mois avant de repartir pour l'Amérique du Nord. Alaska, Canada avant de descendre aux États-Unis, Mexique et ainsi de suite jusqu'à la Terre de Feu, la Patagonie, du moins, c'était soin plan initial.
Beaucoup de pays différents, mais surtout, beaucoup de rencontre, énormément. Au début, elle était partie comme une sorcière et finalement, avec le temps, elle en avait presque oublié sa baguette. Elle s'était replongé dans le monde des moldus, utilisant leurs moyens de locomotions, leur façon de vivre, sa baguette dissimulée aux yeux des autres, elle ne s'en séparait pas, mais ne s'en servait qu'à de rare occasion.
C'est lors de son voyage qu'elle découvrit sa bisexualité. Siobhàn, plutôt que de sélectionner un genre, elle sélectionnait l'humain. Peu importe homme ou femme, c'est les personnalités qui l'intéressait. Elle a eu de nombreuses relations, de nombreuses expériences sexuelles – parfois très bizarre même pour elle – et elle ne saurait dire ce qu'elle préfère, tout dépend de ses envies. En tout cas, elle ne connut pas l'amour véritable, encore une fois, son esprit individualiste prenait le dessus.

Pendant ces années à bouger, il lui avait fallut gagner sa vie. Au début, elle s'était mise à vendre ses dessins, faire des portraits, jusqu'à ce qu'elle décide de se lancer dans le tatouage – plus lucratif. Cela lui permit de gagner un peu sa vie, mais ce n'était pas non plus fou. Par contre, elle se passionna pour ce nouveau « support » et elle ne cessa de se perfectionner, jusqu'à intégrer la magie dans ses tatouages .
Ce qui lui permit surtout de vivre pendant ces longs mois, c'était ses arnaques. Elle développa des dons qu'elle ne soupçonnait pas, celui de voler, d'escroquer, d'arnaquer et de manipuler. Bien sûr, tout ça aidé de magie – oui, elle s'en servait surtout pour ça. Au début, c'était juste voler des portefeuilles, trafiquer de la monnaie ou jeter des sortilèges de confusion lorsqu'elle devait payer un truc. Puis elle s'est prise au jeu, c'était grisant après tout. Elle s'est ensuite mise à manipuler des hommes et des femmes fortunés, à les séduire. Elle était mignonne, jeune, chétive, plus d'un homme s'intéressait à elle et elle, elle les choisissait riche, peu importe s'il était vieux, elle se faisait entretenir dans de beaux hôtels pendant une semaine, côtoyer les plus beaux restaurants, faisaient boire ses proies, les ramenait à l'hôtel et de là, elle faisait ce qu'elle voulait. Évidemment, elle faisait toujours la même chose, voler le liquide, les bijoux et carte bleue, la voiture et elle s'enfuyait.
C'est avec tout ça, qu'elle apprit à changer d'apparence. Changer de couleur de cheveux, de coupe, d'habits, de maquillage et s'il le fallait, s'aider d'un peu de magie. Elle avait développé de vrai dons de caméléon. Et dans l'ensemble, elle s'est plutôt bien débrouillé, il y a quelques pays dans le monde où une femme avec ses traits et rechercher par les autorités moldus. Après tout, c'était toujours gênant pour un homme puissant et riche de se faire berner par une gamine et du coup, la plupart de ses victimes passaient l'incident sous silence.

En tout cas, ça lui permit de vivre de manière plutôt agréable et même quand elle en avait pas besoin, elle s'adonnait à ce genre d'activité pour se divertir.
Toute cette vie d'insouciance se cassa la gueule lorsqu'elle reçut un message sur son téléphone via Facebook – oui, vu qu'elle vivait plus comme une moldue que comme une sorcière, elle s'était mise à niveau – de son frère. Il fallait qu'elle rentre.  


V – Un retour au réel

Un retour au réel. C'est comme ça qu'elle ressentait les choses dans son avion en direction de Londres. Elle aurait pût prendre un portoloin pour se déplacer plus rapidement et cette idée lui avait effleuré l'esprit, mais elle avait besoin de temps pour faire le point. La veille elle rentrait sur La Paz après deux semaines dans la forêt amazonienne, elle avait rallumée son téléphone à une borne wifi et avait reçu un message de son frère. Sa mère était malade. Pour que son frère lui envoie ça, elle se doutait que ce devait être grave, mais quand elle avait essayé d'en savoir plus, pas de réponse.
Elle avait tout plaqué, son petit groupe d'amis avec qui elle voyageait, elle avait pris le strict d'affaire minimum et avait sauté dans le premier avion en direction de Londres où elle prendra de nouveau un vol jusqu'à Cork.

Cinq ans qu'elle n'avait vu aucun de ses proches – exceptés lors de son séjour en Nouvelle-Zélande qui remontait à deux ans en arrière – et elle donnait quasiment pas de nouvelles. Elle vivait véritablement dans sa bulle, celle qu'elle s'était construite, des gens qu'elle croisait dans ses pérégrinations l'y rejoignait pour un temps puis en sortait, faisant la place à de nouvelles personnes et ainsi de suite et Siobhàn, tenait à cette bulle composé uniquement de gens vivant proche d'elle, dans le moment présent. Sa famille loin d'elle qu'elle n'avait pas vu depuis de nombreuses d'années n'y avait pas sa place. Elle ne les reniait pas pour autant, c'est juste qu'ils ne faisaient pas parti de son présent et l'instant présent, c'est ce qui compte pour Sio.
Dans l'avion, elle pensait à tout ça, sa façon d'être, son comportement, son rapport aux autres et surtout à sa famille. Sa sœur, qui était violoniste dans un orchestre londonien, prof de musique à mi-temps. Son frère qui vivait toujours à Limerick, qui avait eu une autre fille – ses nièces qu'elle ne connaissait pas –, son père qui était sûrement à Limerick aussi et sa mère à Cork, malade visiblement. Qu'avait-elle fait ces dernières années ? Et son père ? Avaient-ils rencontrés quelqu'un ? Avait-elle un beau-père ou une belle-mère qu'elle ne connaissait pas ?
Trop de questions, pas de réponse, elle ne savait rien sur ses proches... Elle se trouvait d'un coup égoïste. Une sensation cruelle s'emparait d'elle, celle d'être une enfant ingrate, qu'elle ne méritait pas une famille comme la sienne.
Ce sentiment elle le portait comme un châtiment, les dents serrées tout du long du voyage, en se disant, qu'elle méritait au moins ça.

Londres, puis Cork en avion et de là elle prit un taxi jusque chez sa mère. Elle pouvait transplaner, mais elle ne l'avait pas fait depuis longtemps et n'avait jamais bien aimé ce mode de transport – et elle n'était pas très douée avec ça de surcroît – du coup, elle préférait ne pas se désartibuler de par son incompétence.
Elle descendit du taxi. Le perron de chez sa mère donnait directement sur le trottoir, elle n'avait jamais aimé cette maison de banlieue de style ouvrière, semblable à toutes les autres de la rue, au mur gris et morne. Elle resta de longues secondes à inspirer et expirer, son regard s'attarda sur la porte blanche. Il y avait un heurtoir. Devait-elle frapper ? Devait-elle rentrer ? Devait-elle faire demi-tour ? Elle n'eut pas besoin de se poser la question trop longtemps, la porte s'ouvrit d'elle-même. Son frère se tenait dans l'encadrement, il ne semblait pas surpris de la voir et s'il ressentait une quelconque émotion à la voir, il n'en montrait pas le moindre signe. En tout cas, il avait bien changé, à le voir, Sio pensait que quinze ans s'étaient écoulés depuis la dernière fois, des cheveux gris comme son teint, des valises sous les yeux, une barbe mal entretenue et surtout, il semblait avoir perdu pas mal de poids, ses vêtements trop grands et ses joues creuses en témoignaient.

« Ry... Ryan ! »

Une envie soudaine de le prendre dans ses bras la prit mais lorsqu'elle s’avança vers lui, il fit un pas de côté et montra l'intérieur d'un geste.  

« Rentre. »

C'était un ton d'où se dégageait aucune chaleur. Les bras de Sio retombèrent mollement le long de son corps et elle rentra dans la maison. Celle-ci sentait mauvaise, il y avait une odeur d'urine camouflé par les produits ménager, une odeur d'hôpital. Elle posa son sac sur le sol et regarda autour d'elle. Rien n'avait bougé dans cette petite maison depuis la dernière fois, juste les quelques cartes postales qu'elle avait envoyés à quelques reprises étaient accrochés sur le frigo. Les bords étaient cornés, le papier user, comme si ces cartes étaient là depuis vingt ans déjà. Combien de fois sa mère les avaient-elles lues ? Siobhàn ravala sa salive et se tourna vers son frère qui était derrière elle.

« Elle est où ? »
« Assieds-toi tu veux ? »
« Je suis resté assise suffisamment longtemps dans l'avion. Elle est où Ryan ? »
« Elle est à l'étage, elle se repose, mais avant que tu m... Sio !»

Elle n'avait pas besoin d'en savoir davantage. Elle monta les escaliers deux à deux et se dirigea vers la chambre de sa mère. Elle posa sa main sur la poignée, une main tremblante, mais résolue. Elle était partie trop longtemps, elle avait du temps à rattraper et surtout, sa mère avait besoin d'elle.
Siobhàn poussa la porte. Il faisait sombre, mais ce n'est pas ça qui la marqua le plus, l'odeur qu'elle avait sentie dans la maison était bien pire ici, une odeur qui lui emplit les narines en lui laissant un goût âcre dans la bouche. Elle fit deux pas timides dans la pièce, ses yeux s'habituèrent à l'obscurité et elle s'avança vers le lit.
Sa mère était sur le côté droit de celui-ci. Elle avait les yeux fermés, la tête légèrement tourné sur le côté. Elle laissait échapper un léger râle en signe de respiration, une respiration qui semblait compliqué.
Siobhàn s'avança encore et elle porta une main à sa bouche pour étouffer un cri. Elle se mit à trembler, les larmes lui montèrent et elle laissa échapper un léger sanglot. Sa respiration s'accéléra et pourtant le temps semblait s'arrêter.
La dernière fois qu'elle avait vu sa mère, c'était une jolie femme, dans la cinquantaine, souriante, aux cheveux blonds, active, forte. Cette femme n'était plus. La femme qui lui faisait face était maigre au-delà du possible, partout où Sio posait son regard elle ne voyait que des os saillants, des os qui soutenaient une peau grisâtre, fine qui semblait friable. Ses cheveux longs d'autrefois avaient quasiment disparus, ils étaient courts, il y avait des trous d'où on pouvait presque voir la peau de son crâne et ils étaient grisâtres.
La main de Sio prit celle de sa mère. Cette main qui était autrefois capable de maîtriser les moutons dans les prairies de Nouvelle-Zélande avait perdu sa vigueur, la peau parcheminé et translucide, les veines saillantes...

« Viens. »

Un murmure. Ryan se glissa sans bruit derrière elle et l'amena en dehors de la chambre. Retour dans le salon, il attrapa la bouilloire qu'il avait mise à chauffer et servit le thé.

« Cancer du sein. C'est arrivé soudainement, à un stade déjà avancé. »
« Quand Ryan ? »
« Il y a presque six mois. »
« Six... Mais pourquoi tu m'as rien dit avant ? »
« Maman ne voulait pas, ça n'aurait pas changé à grand-chose qu'elle disait. Et puis j'ai quand même essayé de te contacter, mais ça aurait été plus facile si je savais où te joindre. Tu sais combien de temps j'ai mis à te retrouver sur Facebook ? »
« Je... Je suis désolé. Mais maintenant je suis là ! Je peux peut-être faire quelque chose tu sais ! Je peux essayer de l'amener à l'hôpital sor... »
« Non tu ne le feras pas. »
« Quoi ? On peut la sauver Ryan, tu comprends ? Par les moyens sorciers ! »
« Non, toi tu comprends pas ! Maman a accepté son sort maintenant et moi aussi. Maïwenn a du mal à l'accepter, mais elle s'y fait doucement. Je veux pas que tu fasses espérer quoi que ce soit à maman, c'est trop tard pour ça. »
« Je vais pas la laisser mourir sans rien faire, tu comprends ? »
« La seule chose que tu peux faire c'est d'être présente ! Ce sera toujours plus que ce que t'as fais pour elle ces dernières années. »
« Ryan... Je... »
« Je prends soin de maman depuis un moment déjà, elle peut pas rester seul et on peut pas se permettre de prendre une infirmière à temps plein et puis, je vais pas la confier à n'importe qui. Les filles sont chez leur mère cette semaine, donc c'est ça de moins à gérer, mais c'est pas évident. J'ai pas besoin que quelqu'un arrive et me dise quoi faire. Tu comprends ça Siobhàn ? »

À la fin de sa tirade, Ryan poussa un soupire et s'affala au fond du canapé. Siobhàn prit une claque, encore une. Ryan était divorcé ? Sinon, il n'aurait pas dit « chez leur mère ». Qu'avait-elle encore raté en cinq ans ? Elle alla se blottir contre son frère et cette fois-ci, il ne chercha pas à se dérober, ses mains serrèrent ses épaules et Sio ferma les yeux, la mélancolie l'envahit et elle se mit à pleurer en silence.

« C'est bon de te revoir Sio. »

Les semaines qui suivirent furent difficile, mais elle était à sa place. Elle ne voulait être nulle part ailleurs, elle ne voulait pas nier les problèmes, pas ce coup-ci. Du coup, elle resta chez sa mère, en profita pour aider son frère, le soulager de la situation, elle fit la connaissance de sa petite nièce et elle renoua avec la plus grande. Mais surtout, elle passait beaucoup de temps avec sa mère. Malheureusement, elle dormait la plupart du temps et quand elle était éveillée, elle délirait. Par contre, elles profitaient de ses périodes de lucidité pour discuter, où plutôt, Siobhàn en profita pour raconter ses voyages, les choses magnifiques qu'elle avait vu, les anecdotes. Sa mère, dans ces cas-là lui prenait la main, se contentait de regarder sa fille avec un sourire aux lèvres et les yeux brillants.
Le cancer avait fait de nombreux dégâts, mais elle restait sa mère et passé le premier choque, Siobhàn ne pouvait s'empêcher de la trouver belle. Elle s'était tout de même renseigné sur son état de santé et même à Ste-Mangouste ils ne pouvaient rien faire, le cancer s'était développé dans son sein jusqu'à son état métastatique qui avait envahi le reste de ses organes et notamment son cerveau, essayer de faire quelque chose à ce stade-là relever du pari insensé, même pour les sorciers et il n'était pas dit que si elle guérissait, elle retrouvait toutes ses facultés mentales. Son frère avait donc raison, il valait mieux laisser la nature suivre son cours.

Hannah Stewart s'éteignit une nuit d'été, une nuit douce. Comme à son habitude, Sio s'était endormit à ses côtés et elle s'était réveillée de bonne heure, aux premières lueurs du jour. Elle n'avait pas bougé, l'absence du bruit de la respiration de sa mère suffit. Elle se mit en boule et laissa parler sa peine. Son frère qui apportait le petit-déjeuner la trouva dans la même position deux heures plus tard.

L'enterrement de sa mère lui permit de renouer avec sa famille. Pour Sio c'était très symbolique, elle qui avait culpabilisé de ne pas être là pour sa famille devait assister aux funérailles de sa mère pour la retrouver. Comment repartir après ça ? Bien sûr, elle avait encore des choses à voir, mais elle ne pourrait pas repartir, pas de suite et pas aussi longtemps.


VI – Depuis 3 ans ...

Depuis 3 ans, Siobhàn n'était plus vraiment partit. Enfin, ce n'était pas complètement vrai, elle avait amené plusieurs fois ses nièces en vacances en Europe, mais bien sûr, c'est différent, y a des dates aller et retour, toute une organisation, loin de ce qu'elle avait fait par le passé.
À la mort de sa mère, Sio décida de rester à Cork et elle reprit la maison de sa mère, pour un temps du moins. Le temps de se remettre « à la page ». Elle ne savait pas vraiment quoi faire, elle envisageait même de reprendre sa formation en médicomage, mais elle devait avouer que ça ne la tentait plus vraiment.
Elle profita de quelques mois à vivre sur ses économies – bien mal acquises – de ses voyages, renouer avec Maïwenn, son père – et sa nouvelle belle-mère que Sio ne pouvait pas encadrer – et le reste de sa famille, cousins, cousines, oncles, tantes, chiens et chats... Mais il n'y avait qu'auprès de son frère qu'elle était vraiment à l'aise et de ses nièces. D'ailleurs, Sio soupçonnait la plus grande d'être douée de magie – l'avenir lui donnera raison car elle intégra Poudlard à la rentrée 2019.

Finalement, elle trouva un premier job sur le Chemin de Traverse à la boutique de Fleury&Bott, ce qui lui permit de se replonger dans le monde de la magie au moment même ou celui-ci était chamboulé par un déséquilibre de la magie elle-même, avec une faille qui était apparut au large d'un bled paumé appelé Oranmore. Elle connaissait l'endroit, après tout, elle avait vécu à Limerick et Oranmore est un petit bled pas très loin. Siobhàn ne s'y intéressa guère au début, jusqu'à ce qu'une véritable effervescence ce créée autour de cette événement avec la première alliance moldue/ sorcière. Sio -elle qui se sentait plus proches des moldus que des sorciers par moment - croyait à un avenir ou sorcier et non-sorcier cohabiteraient en harmonie.
Du coup, elle quitta Fleury&Bott pour aller travailler dans un premier temps à la Three Brother's Bookshop, mais elle n'y resta guère, les livres c'était bien, mais ça racontait toujours la même histoire. Elle voulait quelque chose de plus animé, du coup, elle prit un premier emploi dans un café, puis finalement, elle alla travailler à l'unique hôtel d'Oranmore.
Cette emploie était aussi assez stratégique, car, dans une petite commune comme Oranmore, le Lodge était un passage obligatoire pour tous les visiteurs et ils étaient nombreux avec l'Université qui ouvrait, la faille... Autant sorcier que moldu et nombreuse étaient les personnes importantes. Pour Sio c'était une aubaine, un moyen de rencontrer du beau monde, prendre des contactes, afin de s'adonner à une de ses passions : manipuler, tromper, arnaquer.
Toutefois, elle se montrait suffisamment habile pour ne pas en abuser à l'accès, au risque de se faire démasquer très vite. Elle subtilisa quand même quelques beaux objets de valeurs dans de beaux manoirs et elle mit ainsi un premier pied dans le monde du marché noir.
Cela fait maintenant plus d'un an qu'elle est à Oranmore et Siobhàn s'y fait doucement sa place, son petit appartement dans le centre, ses contactes dans les milieux fréquentables comme moins fréquentables, ce qui était légal et ce qui l'était moins. Dans cette petite ville qui prenait rapidement de l'ampleur, avec une effervescence croissante, les opportunités étaient grandes. Après avoir dessiné le monde, elle voulait dessiner son avenir.