Mila + All the good girls go to hell ♡

« Alors, c’est quoi ta prochaine destination ? »

Milana referme son sac à dos, qui contient pratiquement toute ce qu’elle possède. Sa baguette, quelques vêtements, un nécessaire à potions transportable, un portable moldu, un carnet et quelques stylos. Elle n’a pas besoin de beaucoup d’autres choses après tout.

« La maison. »

Il n’y a pas vraiment de maison à proprement parler. Il n’y en a jamais eu. La jolie histoire du petit couple qui achète une maison, adopte un chien puis a une ribambelle d’enfants… ce n’est pas celle de Milana. Le début de l’histoire est beau, un homme un peu bourru qui rencontre une jeune femme d’apparence douce, mais qui souhaite plus que tout changer les choses. Ils appartiennent au même groupe de rebelles, des sorciers qui veulent un nouveau monde. Ils veulent plus d’entraide et de partage, moins de discriminations, plus de libertés. Au départ, ce ne sont que des tracts livrés par hibou et des assemblées pour discuter tous ensemble. Puis des actions sont menées, contre le gouvernement, contre la brigade magique d’Ukraine, contre les suprémacistes de sang-pur. Vitalia est née-moldue, elle a l’impression qu’elle n’a rien à perdre. Toujours la première volontaire pour les missions de désobéissance, elle ne s’arrête même pas à la naissance de Milana. Elle veut lui offrir le meilleur futur possible, dans une société où tout le monde peut être libre d’être ce il veut. Mais elle n’aura jamais le temps de voir sa fille grandir au-delà de sa quatrième bougie. Assassinée un soir d’hiver à Odessa, alors qu’elle allait récupérer sa fille après une journée de travail. Jamais d’enquête, encore moins de procès : la Brigade est bien contente de s’être débarrassée de la rebelle.

« Tu retournes voir ton père ? »

La paternité est tombée sur Anatoli en même temps que le décès de la femme qu’il aimait. Il avait en tête le schéma classique de la famille qu’il essayait de reproduire : la mère qui s’occupe des enfants, le père qui les protège. Et puis, il avait passé plus de temps en prison ou en fuite qu’auprès de sa femme et de sa fille pendant quatre ans… Démuni face à cette petite fille blonde qui pleurait en réclamant sa maman, il n’hésitait pas à aller squatter quelques semaines chez leurs amis rebelles. C’est avec leur aide qu’il éduque Milana, sans vraiment de règles – les livres d’éducation à la Montessori, très peu pour lui. Il préfère aller en forêt, lui apprendre grimper aux arbres et l’emmener sur son dos quand il se transforme en ours.

« Oui, ça fait longtemps que j’l’ai pas vu. »

Relation quasi-fusionnelle entre le père et la fille. Il arrête les missions risquées – qui s’occuperait de sa fille s’il se retrouvait à nouveau en prison ? – et commence à former des jeunes rebelles dans les caves des squats où ils vivent. Milana s’assoit au fond de la salle, boit ses paroles. A 11 ans, elle ne veut pas partir à Durmstrang. Elle dit que son père peut tout lui apprendre, mais il estime que ça ne lui ferait pas de mal d’avoir un vrai cadre, pour une fois. Elle veut lui faire plaisir, alors elle travaille bien et essaie de se faire des amis. Et puis un jour, elle reçoit une lettre, son père est en fuite. Le groupe rebelle a été dissout et tous les membres – son père particulièrement – sont activement recherchés. A la fin de l’année, elle sait où le retrouver, ils avaient convenu de cette cachette dans les bois en cas de problème. Mais son père n’est pas seul dans la clairière.

« J’ai d’autres gens à voir aussi. »

Lyuba s’est imposée dans sa vie sans qu’elle n’ait son mot à dire. La brune riait avec son père comme avec un copain, donnant à Milana l’impression de s’être fait voler sa place auprès de son père. C’est temporaire, mais la russe était là à chaque retour de Durmstrang. A 15 ans, elle trouve un vieux rituel dans un livre à l’école, pour se débarrasser des choses indésirables. Elle le réalise à peu près, et apprend quelques jours plus tard qu’un incendie a détruit le village natal de Lyuba. Un de ses souvenirs d’enfance remonte, une dispute avec sa mère et sa propre voix qui lui hurle de disparaître parce qu’elle ne voulait pas lui donner une cinquième pâte de fruit. Elle commence à faire des cauchemars, dans lesquels elle est une meurtrière. Toutes les nuits elle voit des flammes, des cadavres, du sang.

« Tu vas faire quoi maintenant ? »

Deux années encore à supporter Lyuba, mais c’est différent maintenant, elle se sent coupable. Elle ne sait pas si la russe a perdu sa famille, quand elles parlent ce n’est pas de ce genre de choses. Milana cherche à prouver à son père qu’elle n’a pas besoin de lui, et finit par maîtriser le pouvoir d’animagus à ses seize ans. Des années à observer les transformations de son père, quelques livres lus à la bibliothèque et des mois et des mois de pratique. Maintenant, elle est un lynx dans la forêt, c’est sous cette forme qu’elle parvient à chasser les pensées négatives et profite de la nature. Quand elle est sous forme humaine, il n’y a guère que les potions qu’elle prépare pour passer un après-midi dans du coton, ou une nuit sans rêve. Les résultats scolaires chutent, ses acquis lui permettent d’obtenir son diplôme de fin d’études de justesse.

« J’retourne à l’école. »

18 ans, aucun projet d’avenir, Milana quitte Durmstrang et ne repasse même pas par l’Ukraine. Elle passe quelques semaines chez une cousine en Pologne avant de prendre un train pour la Russie. Elle veut savoir ce qu’il s’est passé dans le village de Lyuba, chercher sa famille et se dédouaner de sa culpabilité. Pas facile de retrouver un patelin paumé, y en a plein dans le plus grand pays du monde. Elle apprend à utiliser Internet, trouve quelques articles et se rend sur place. Les images du village fantôme s’ajoutent dans ses cauchemars, les médias moldus parlent d’une fuite de gaz qui aurait déclenché un gigantesque incendie. Dans les journaux sorciers, on se questionne, mais personne n’est mis en cause. Milana passe ses journées à traîner dans les villages alentours, espère attraper une information dans les bars miteux. Elle mène sa propre enquête et n’avance à rien. Pour vivre, elle vend quelques potions de sa fabrication, aux sorciers et même aux moldus un peu superstitieux.

« Toi, enfermée dans une salle de classe ? »

Quatre années de liberté, à n’être portée que par ses envies et ses recherches. Mais tout ce temps sans atteindre un seul objectif, elle n’est pas loin de la dépression. Elle serait sûrement en plein dedans si elle n’avait pas ses potions pour s’évader de la réalité. Son père lui a parlé d’une université en Ecosse – ou peut-être en Irlande ? Apparemment, il y a un programme tourné vers la nature, et elle pourrait conserver une part de sa liberté.

« On m’a parlé d’un truc de source de magie, j’ai pas tout compris mais ça a l’air important. »

Elle veut se rendre utile, réussir enfin quelque chose dans sa vie. Peut-être même qu’elle veut lâcher un peu cette influence slave qu’elle n’a jamais quittée, sans se douter qu’elle va rencontrer un cousin qu’elle n’a jamais rencontrer. Elle pense aller de l’avant, mais elle ne sait pas que Lyuba est là-bas, que d’une certaine manière elles ont besoin l’une de l’autre. Pour une fois, elle connaît sa destination, mais elle n’a aucune idée ce qu’elle cherche.