Comme on se retrouve feat Zephÿr

Passer d’Auror à concierge pouvait sembler dégradant, et cela l’était certainement à bien des égards mais étrangement, William aimait bien son nouveau boulot.

Avec la pension d’invalidité que lui versait le Ministère, il pouvait vivre confortablement sans avoir à travailler mais les longs mois qu’il avait passé en convalescence lui avait tout de suite fait prendre conscience qu’il ne supporterait pas de rester à rien faire. Mais à cause de ses capacités devenues plus limité suite à son accident, il ne pouvait plus espérer une carrière comme il avait eu. Il pouvait également oublier les carrières « pré-retraites » traditionnelles tel que l’enseignement. En fait, pour être franc, il n’y avait pas grand-chose qu’il pouvait vraiment faire comme travail désormais. Mais concierge convenait.

Il venait justement de passer un bon moment à s’occuper d’un problème de porte grinçante lorsque les cours prirent fin. Avec la marée humaine, Will se remit pour de bon au travail et, lorsque les étudiants disparurent à nouveau pour leurs cours suivants, il s’attaqua au nettoyage du sol du hall d’entrée.

Il aurait très bien pu le faire à coup de baguette, d’ailleurs son contrat stipulait que l’usage de la magie dans son travail était parfaitement conforme, mais Will n’utilisait presque plus sa baguette depuis l’accident, même s’il avait réussi les tests d’aptitude. Au début, c’était surtout par crainte de commettre des erreurs qui pourrait être dangereuses puis, avec le temps, il s’était habitué au travail manuel et s’était même mit à l’apprécier. Cela lui occupait l’esprit et le gardait physiquement en forme. Ainsi, il ne sortait sa baguette que lorsqu’il n’avait pas d’autres alternatives. Alors oui, du coup le travail était fait plus lentement mais cela n’était visiblement pas un problème aux yeux des dirigeants de l’université.

Will avait nettoyé la moitié du hall quand il entendit la porte s’ouvrir et des pas résonner là où le sol était encore humide. Un travail sans fin de nettoyer les sols à l’eau dans ces bâtiments. Il y avait toujours quelqu’un pour se pointer avant que cela ne soit sec

Faites attention… ça glisse…, lança-t-il machinalement en relevant la tête vers l’arrivant pour s’assurer qu’il avait entendu, repoussant au passage une mèche blonde de devant ses yeux. Ayant gardé les cheveux très courts toute sa vie, il avait encore parfois un peu de peine à s’habituer à leur nouvelle longueur et se disait souvent qu’il faudrait qu’il les recoupe sans rien en faire pour autant.

Ce fut à ce moment que ces yeux se posèrent sur l’arrivant qui n’avait rien d’un élève, ni d’un professeur. A la place, il se retrouvait face à un vieux souvenir qu’il ne s’était pas attendu à retrouver là.

William se figea un instant en fixant le type. Dire qu’ils se connaissaient était un grand mot. Ils s’étaient parfois retrouvés sur les mêmes interventions à l’époque où Will était encore Auror mais malgré le fait qu’ils étaient de même âge, les deux hommes n’avaient jamais sympathisés.

Salut…, finit-il par dire, tout simplement, sans cesser de fixer Zephÿr, appuyé sur le manche de sa brosse à récurer.

Will avait toujours été mal à l’aise face à ses anciens collègues, ou plus ou moins collègues lointain également, depuis son accident. Il y avait ceux qui le regardaient avec pitié, ceux qui le traitait avec dédain… Il avait eu la condescendance de son chef e Département quand il lui apprit qu’il était viré. Oui enfin non, « qu’il ne pouvait plus exercer ». C’était normal qu’il ne puisse plus être Auror, il ne s’était pas attendu à le rester, mais la scène avait juste manqué de la petite musique au violon.

Depuis qu’il avait vidé son bureau, William devait admettre qu’il avait tout fait pour ne plus revoir ceux qu’il avait fréquenté au Ministère. Il s’était coupé de cette partie de sa vie. Mais parfois, elle lui revenait en pleine face… Comme maintenant, en la personne de Zephÿr.

A la question du Tireur de baguette, Will fronça des sourcils alors que son regard se perdait dans le vide, cherchant clairement la réponse dans sa mémoire parfois défaillante, avant de hausser des épaules.

Je sais pas trop… Plus d’un an. Un peu moins de deux…

C’était la vérité, sur le coup il n’arrivait plus à se rappeler à quel moment précisément il avait atterri là.

Le regard bleu glace de William se reposa sur Zephÿr quand il lui fit une remarque sur l’utilisation de la magie.

J’ai le droit d’utiliser la magie…, dit-il comme un enfant récitant une leçon. J’ai passé le test d’aptitude pour conserver ma baguette.

Son comportement en cet instant était à des années lumières de celui qu’il avait eu à l’époque. Lorsqu’ils travaillaient ensemble, à ce genre de remarque Will aurait eu une réponse bien cinglante qu’il aurait lâché en prenant Zephÿr de haut, le regardant comme s’il ne voyait en lui qu’un petit avorton bien qu’ils aillent le même âge.

Mais là, William était le calme personnifié. Pas de rictus de dédain, pas de regard assassin. Il restait juste là, à observer son ancien « collègue ». Toute la hargne légendaire de l’Auror Wiliam Blackstone semblait avoir disparu dans l’eau de la rivière dans laquelle on l’avait retrouvé.

C’est juste que je préfère utiliser la méthode… euh… tu sais…, dit-il en cherchant ses mots. Enfin, faire le boulot moi-même. C’est moins rapide mais si je vais… Trop vite ils voudront… baisser les heures de mon contrat, termina-t-il de sa locution difficile avec un petit sourire en coin avant de soudainement se redresser – lui qui était toujours appuyé à sa brosse – en fixant Zephÿr comme s’il ne réalisait que maintenant qui il avait devant lui.

Tu fais quoi ici ? T’es pas prof… Le Ministère a décidé de… te renvoyer sur les bancs d’école ?